Aussi loin que je me souvienne, j'ai toujours entendu du rock'n'roll à la radio; des trucs comme "shaking all over", "you never can tell", parmi la chanson et la variété française.
Mais ce qui m'impressionnait le plus, c'était de voir, en revenant de l'école, les rockers en cuir, banane, santiags, jouer au flipper dans les cafés: ça c'était la classe! On était pourtant plutôt dans les années "hippie" mais ça, ça ne me faisait pas du tout le même effet.
Ma mère étant finlandaise, on allait voir la famille de temps en temps. Il faut bien dire que là-bas, surtout dans le nord de la Finlande, c'est vraiment pas pareil qu'en France! Déjà la nature est très sauvage, et dans les 60' les routes n'étaient pas goudronnées et la plupart des habitations à la campagne étaient des fermes de bois souvent peintes en rouge grenat avec dans la cours une voiture de rally ou une américaine. Ca faisait tout à fait ambiance "sheriff fais moi peur", d'autant plus qu'à la radio passait beaucoup de country et de rock'n'roll en version originale ou -malheureusement- en version finnoise.
Un peu plus tard, je devais avoir dix ans, un cousin d'adoption qui était déjà rocker, à Etampes, me fait écouter Vince Taylor! Déjà, juste les pochettes te causaient tout de suite! Tu vois Vince tout de noir vêtu brandissant une chaine au dessus de sa tète, la parfaite image du rebelle! (sans drapeau). Et le disque passe sur l'électrophone; punaise l'intro de "brand new cadillac"! Ça m'a foutu des frissons, je m'en rappelle encore! J'ai beau avoir le plus grand respect pour Joe Strummer, mais rien a voir.
Après j'achète mes propres disques; c'était des vinyls trouvés sur le marché à dix francs, de groupes qui reprenaient des standards et qui avaient des noms genre machin rockers ou truc rollers. Ça avait en tout cas le mérite de ne pas être cher...
A douze ans t'avais pas beaucoup de sorties à Etampes à part le marché et la fête foraine. Là, tu pouvais voir différentes bandes de rockers à la buvette, à la machine à coup de poing ou aux auto-tamponneuses. Les auto-scotters, comme on disait, c'était pas rien; déjà les murs d'entourage étaient peints de Johnny, Elvis, Bill Haley... et ils ne passaient que du rock'n'roll. C'était un peu le lieu de confrontation entre les bandes en attendant le bal itinérant. C'était donc parfois mouvementé, même les filles se battaient! mais une fois je me souviens d'une attraction beaucoup plus intéressante; le bruit courrait que devant "le madrigal" était garé un "Harley", tout le monde connaissait mais personne n'en avait jamais vu! Donc on monte voir et là, parmi "Guzzi" et "Malag"; un "Harley"! Un Harley 125 made in Italy mais avec les chromes et tout quand même.
Et pis y'avait "Happy Days", ça c'était cool ça "Happy Days"! Je me souviens que dans un épisode, "Fonzie" faisait de la cascade en bécane; le générique était pas encore fini que j'entendais déjà les gars monter au terrain de cross en "Guzzi" et autres mobs.
Plus tard, au collège, je découvre AC/DC, là c'est un autre tournant, tu sais que ça ne te quittera pas non plus! S'en suivent ensuite des groupes tels que The Angels (angel city) et surtout Rose Tattoo, là c'est encore autre chose! En plus de la musique, y'a leur putain de dégaine de dingue; tu vois tout de suite que c'est pas de la frime, pas du préfabriqué. C'est là que je chope un vieux blouson en jean, je lui coupe les manches et je peind dans le dos AC/DC et Rose Tattoo; c'était parti!
A l'époque je traine avec Regent bien branché rock'n'roll avec qui on se fait AC/DC au Bourget. Il avait une grosse caisse "sonor" dont il ne faisait rien, il me la vend pour cent francs. Je commence donc à jouer à plat dessus avec une règle carrée et une plate comme baguettes et un bidon de lessive à coté, super! Il me vend aussi le premier disque des Damned : une autre révélation! La ça faisait moins l'unanimité auprès des potes! Et il fallait s'accrocher pour trouver des disques dans le genre, mais on avait la foi, mon frère Alain (tétard) et moi... Quand tu cherches tu trouves!
Là je rencontre deux punk-rockers Paul et Hervé qui me font connaitre encore d'autres groupes: Undertones, Stranglers... Paul jouait déjà de la gratte, on décide de monter un groupe. Hervé devait prendre la batterie et moi la basse, par la suite il change d'avis veut prendre la basse donc je prend la batterie. Finalement il nous lâche, je garde la batterie et mon frère prend la basse.
Me reste plus qu'a trouver cette fameuse batterie, ça courrait pas les rues à cette époque. J'en trouve une sur les petites annonces; une "Pearl" qu'un baluchard vendait. Avec des super cymbales et "le chrysler est bon aussi" qu'il disait! Je la prend, la ramène et la monte. Mon frangin avait déjà emprunté une guitare faute de basse, j'appelle Paul pour lui dire qu'on est prêts, il débarque le lendemain en RER de Longjumeau avec guitare et ampli. On branche donc forcement les deux guitares sur l'ampli, c'était parti pour le carnage; ni mon frère ni moi n'avions joué avant.
Au bout de quelques mois on arrive quand même à faire quelques morceaux et à trouver un nom: Koffa; "fuck-off" en verlan. ça tourne court.
Par hasard on découvre avec mon frère un groupe a la radio: The Meteors. Ils jouaient a Paris et le concert était retransmit en direct sur France-Inter, on l'a enregistré. Encore une autre découverte, une autre illumination; rock'n'roll speedé à l'excès avec les voix de dingue des deux chanteurs; ça ne me quittera pas non plus.
Un peu plus tard on monte un groupe avec deux guitaristes, Steph et Baboune, mon frère à la basse et moi à la batterie. De ce temps là on faisait des fêtes monstrueuses dans des anciennes champignonnières, qu'on appelait les grottes, on se retrouvait a une cinquantaine, on amenait poste à cassette et alcool, des fois des merguez, ça durait jusqu'au matin.
On a même voulu y enterrer un pote qui allait finir a la fosse commune; là on s'est déballonnés. On faisait le même genre de fêtes dans des décharges publiques, on appelait ça "grande crado".
Donc le groupe se monte, on s'appelle les Grottesk à cause de nos fêtes. On fait une musique primitive, tribale et instrumentale inspirée de loin par Killing Joke, Virgin Prunes, Birthday Party, The Cramps. Le tout distillé à grand coup de gin, vodka et autres artifices... On a jamais fait de concert, ça nous suffisait comme ça et on était pas sur que ça puisse plaire.
En même temps je fais ma première scène avec Acid Airways (avec Nanard, Gim et Xoumoul) groupe de punk-rock qui cherchait un batteur; trois semaines de répet' et hop!, premier concert. Ca a du durer trois ans avec une vingtaine de concerts.
Là, un oncle chez qui j'avais travaillé sans être payé débarque de Finlande; Je le tanne pour qu'il me rembourse. On fonce donc à Pigalle et je trouve une vielle grosse-caisse "Gretsch" de 24" des années 70! J'en ai jamais changé!
On était une bonne bande à trainer dans les cafés d'Etampes, surtout "Chez Nono"; bar-tabac-billard-coiffeur (tout les psycho du coin se faisaient coiffer là; y'en a même qui venaient de Paris)
En face Mouss avait sa boutique de fringues rock'n'roll ("Partner's Rock") et Notche ("Tatoo Notche") tatouait au fond.
Je vous explique pas le rencard le weekend, surtout quand y avait concert au "Rex Club" ou au "Gibus" et que ceux de "St Chéron" et d'un peu tous les environs débarquaient. On pouvait être jusqu'à 70 en comptant les filles, on débarquait à tout cette clique en Arondes, Ariannes et DS, c'était du plus bel effet.
Dans la bande, y'avait Gambeat, appelé aussi Ding-Dong, dingue de contrebasse, il slappait sur tout ce qui bougeait mais n'avait pas d'instrument. Il finit par l'acheter et on file tout les deux au local, il slappait sans problème, je lui montre les trois-quatre conneries que je connaissais à la basse et c'était parti; en deux semaines il savait déjà jouer!
C'est à ce moment qu'il est intégré dans un groupe pour former les Zgeg Boogie Boys; la bonne aubaine!
C'est à cette époque que je commence a monter des chapiteaux avec quelques gars de la bande, on était en déplacement donc le pognon rentrait pas mal. J'ai donc pu m'acheter à Pigalle une caisse claire d'occasion, une "Gretsch" sur laquelle je joue encore aujourd'hui.
On avait toujours un projet avec Gambeat mais pas de guitariste.
On en essaye plusieurs dont Landru (on l'appelait comme ça a cause de sa barbe) Faut dire qu'en rock'n'roll il y connaissait pas grand chose; il chantait "that's allright mama" en yaourt tout en s'accompagnant tant bien que mal a la guitare.
Une fois il se pointe en disant: "ma femme a retrouvé un vieux T-shirt des Meteors que je m'étais fait début 80'!". il puait le marqueur tout frais, on s'est regardés avec Gambeat...
Un soir, il nous dit: "j'ai une nouvelle guitare; elle va vous plaire!" Il nous sort une espèce de guitare "made in taiwan" toute décorée de toiles d'araignée!
Dans l'heure il était viré!
Finalement on pense à Xoumoul qui venait de quitter les Zgeg; ça le fait direct mais on cherchait un guitariste-chanteur. On se partage donc les chants en commençant par des reprises comme "love me", "hot & cold" pour Gambeat et "shaking all over" ou "attack of the zorchmen" pour moi.
on a fait notre premier concert sous le nom de "Hellcrack" le 1er octobre 1988 avec Pussy Killers et Batmobile.
On a rajouté le "S" du milieu par la suite...
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